Le bâtonnier de l'ordre des avocats de la Réunion poursuivi pour diffamation envers Rachida Dati(Afp, 18/09/2008, 19h32)
Le bâtonnier de l'ordre des avocats de Saint-Pierre-de-la Réunion, Me Georges-André Hoarau, a été cité à comparaître le 25 septembre pour diffamation envers la ministre de la Justice Rachida Dati pour des propos tenus lors d'une audience, a-t-on appris jeudi de source judiciaire.
Lors d'une audience du tribunal correctionnel de Saint-Pierre, le 15 mai dernier, Me Hoarau, qui défendait un prévenu poursuivi pour avoir perçu indûment des allocations, avait mis en cause les diplômes de Mme Dati.
"La Caf (caisse d'allocations familiales) se met à poursuivre des gens qui produisent des faux pour des allocations. Je ne sais pas si un autre procès aura lieu - je ne le souhaite pas - mais je me demande quelle peine serait requise contre Rachida Dati, notre ministre de la Justice, qui a produit un faux document justifiant un diplôme" avait lancé l'avocat.
Le bâtonnier faisait ainsi allusion à une polémique autour d'informations de presse, l'Express ayant affirmé que la ministre avait présenté un dossier pour intégrer l'Ecole nationale de la magistrature mentionnant "l'obtention d'un MBA européen du groupe HEC-ISA". La Chancellerie a démenti, indiquant que Mme Dati n'avait "jamais prétendu être diplômée d'un MBA européen".
Le procureur de la République de Saint-Pierre, Patrice Cambérou, présent à l'audience, était aussitôt intervenu. "Je ne peux pas laisser dire ça, en pleine audience, contre la ministre de la Justice. La présomption d'innocence vaut pour tout le monde", avait-il rappelé.
Une enquête avait été confiée à la brigade de recherches de Saint-Pierre. A l'issue de celle-ci, Me Georges-André Hoarau a reçu en juillet une citation à comparaître pour le 25 septembre devant le tribunal correctionnel de Saint-Pierre afin de répondre de diffamation publique envers la ministre.
"C'est un problème de droits de la défense. La salle d'audience sera noire de robes noires", s'est borné à réagir l'avocat.
Me Hoarau a reçu dans un communiqué le soutien de la Conférence des bâtonniers de France et d'outre-mer.
"L'avocat dispose d'une indépendance intellectuelle et économique à l'égard des pouvoirs quels qu'ils soient" a déclaré la Conférence des bâtonniers, pour qui la mission de l'avocat "implique, dans les seules limites de la préservation de l'ordre public, un droit d'expression absolu, indépendant de toute soumission".
Les poursuites engagées par la ministre sont de nature, selon elle, "à porter atteinte à une liberté à laquelle les avocats n'entendent pas renoncer".
La Conférence a annoncé qu'elle participerait à la défense de l'avocat réunionnais en déléguant un représentant au procès.